Nous savons tous que la crise économique que nous traversons est une crise d’origine financière, et que l’éclatement de la bulle financière, a provoqué des dégâts qui se sont invités dans l’économie réelle, provoquant un brutal ralentissement de l’activité. En substance, le monde financier ayant vu s’écrouler ses châteaux de cartes, a connu des difficultés et a rendu l’argent plus rare pour les entreprises industrielles, artisanales, commerciales, c’est-à-dire l’économie réelle, les mettant ainsi dans la gêne, pour ne pas dire davantage.
A cette occasion, de nombreuses réflexions sur le sens de l’activité économique et la finalité de l’entreprise sont revenues sur le devant de la scène pour tenter, soit de justifier, soit de discréditer, le système économique dans lequel nous vivons.
Mais cette façon binaire d’aborder notamment la question de la finalité de l’entreprise est stérile dans la mesure où elle cantonne le débat sur le terrain spéculatif et ne permet pas d’apporter à cette question un éclairage susceptible de dégager des solutions concrètes pour l’avenir.
Revenons au réel et partons de lui.
Les entreprises, dans leurs statuts, ont une raison sociale qui explique ce pour quoi elles sont été constituées. C’est leur raison d’être. En accomplissant leur raison sociale, elles fournissent des produits et services à leurs clients, et elles doivent le faire en gagnant leur vie, faute de quoi, c’est leur survie et leur développement qui se trouve compromis. Pour vivre dans la durée, une entreprise est donc condamnée à faire du profit, à dégager des bénéfices !
Comme le disait un grand industriel, « le profit n’est pas la finalité de l’entreprise mais la condition indispensable de sa pérennité ». Le profit, dans sa nature économique, est donc la condition de la survie de l’entreprise et de son développement. C’est un moyen. Or transformer un moyen en fin fausse ce que l’on fait, en économie comme ailleurs. Le profit, le bénéfice est par nature un résultat, positif en l’occurrence, sinon, cela s’appelle une perte… Ce qui résulte d’une activité mettant en œuvre de nombreux moyens est par définition variable. La notion même de résultat implique donc que c’est une donnée variable.
En voulant faire du profit la finalité de l’entreprise, et en fixant de surcroît des valeurs de résultat apriori, les tenants de la vision financière des entreprises, ont voulu rendre fixe ce qui était variable par nature. Mais procéder de la sorte, c’est faire tourner l’économie à l’envers. La conséquence est que les autres éléments de l’exploitation de l’entreprise sont devenus des « variables d’ajustement », et notamment la masse salariale, c’est-à-dire les effectifs de l’entreprise. On comprend mieux dès lors pourquoi certaines « variables d’ajustement » ont emprunté parfois des voies inhabituelles pour manifester à leurs dirigeants ce qu’elles pensaient de cette marque de considération.
Si la finalité de l’entreprise n’est pas le profit, est-elle pour autant l’épanouissement des hommes et des femmes qui la composent ? Pas davantage, même si ces propos sont empreints d’un grand humanisme ! Les personnes qui travaillent dans une entreprise concourent à son activité et à son résultat. Elles représentent un des moyens par lesquels l’entreprise accomplit sa raison sociale, quelle que soit leur valeur, leur compétence et leur engagement. Si important qu’ils soient, le bien-être des personnes et leur épanouissement ne sauraient constituer la finalité de l’entreprise.
La finalité de l’entreprise, c’est-à-dire ce pour quoi elle est constituée, est au fond de créer des richesses, de fournir des biens et des services, pour répondre aux besoins de la vie en société. Quant à la richesse, disait Henry Ford, elle a une finalité plus haute, qui n’est pas de « faire de l’argent », mais de faire que l’argent améliore la vie.